Nus descendant l’escalier

Nus descendant l’escalier #6

Leicester, LDIF (Let’s Dance International Festival), avril 2022

Voir article de madininart : https://www.madinin-art.net/nus-descendant-lescalier-en-ouverture-de-la-biennale-de-danse/

Extrait

D’abord c’est un chant, un cri, un chant, un cri. On ne sait, ni d’où il vient, ni ce qu’il est. Superbe et saisissant il envahit le hall de Tropiques-Atrium. Puis une silhouette apparaît dont on voit d’abord les pieds, puis les jambes et le corps enfin. Cette fois, c’était lui devant et elle derrière. Collée à lui, presque invisible ils descendent l’escalier, lentement marche après marche. Image démultipliée du même comme un clin d’œil à la chronophotographie qui inspira le tableau de Marcel Duchamp et/où évocation d’un état d’indifférenciation, de « fusionnalité » diraient les thérapeutes du couples ? On ne sait et on ne veut pas savoir on veut ressentir ce qu’ils expriment là, maintenant au bas de cet escalier de marbre blanc, là maintenant qu’elle sort de son ombre, qu’elle se détache pour une nouvelle attache. Elle est au sol, à quatre pattes, une laisse autour du cou. Il lui fait faire le tour du parvis intérieur de Tropiques-Atrium. Lentement, toujours lentement, au ralenti, comme dans un état de toute éternité. D’autres fois c’est lui l’animal de compagnie qu’elle promène. Le tour accompli, il lâche la laisse. Toujours sur ses quatre pattes elle esquive un départ, fait un tour sur elle-même et revient vers lui tête baissée comme soumise. Alors, alors seulement, il s’agenouille devant elle, puis s’allonge bras et jambes en croix dans l’attente. Le passage de la relation verticale à l’horizontalité lui permet à elle de se relever sur les genoux, de se défaire de sa laisse, de laisser tomber le loup et les autres masques qu’elle portait ainsi que l’animalité qu’ils signifiaient. Elle s’avance entre ses jambes, lui caresse le sexe de ses cheveux. Il se cambre. Elle se retire, s’allonge elle aussi dans la même position que lui et se cambrent plusieurs fois à l’unisson. Elle chante ou pousse long un cri semblable et tout aussi beau que celui qui ouvre la performance. Sexualité qui dans un au-delà de la jouissance ouvre l’horizon du plaisir comme signe d’accès à une humanité. Ils peuvent donc se relever. Elle sort de sa petite culotte un flacon de parfum et accompagnée de son alter ego elle tourne au tour de la scène jetant quelques gouttes de parfum sur le public. […]

© Madinin’Art / Par Roland Sabra

Conférence avec la participation de H. T. et A.G.

« In situ, responding to space, place and time conference », LDIF (Let’s Dance International Festival), mai 2022, Leicester